The Anglophone Problem: A Francophone Response- Brice Nitcheu

Je viens ajouter ma modeste voix a celles, tres nombreuses, qui pensent, à juste titre, que le radicalisme de la communauté nationale Anglophone, qui enrichie notre pays par sa diversité, est la conséquence d’une trés vaste panoplie de mépris et d’humiliations de la part des gouvernements camerounais successifs dont le point d’ancrage est aujourd’hui Paul Biya

1- Aucun peuple au monde ne peut subir de telles opprobres sans réagir. Nous autres, qui sommes nés accidentellement dans la partie francophone du Cameroun, avons été, et sommes restés pendant des années des complices passifs des régimes de ripoux dans leur pratique de l’apartheid, parce que cette situation nous profitait d’une certaine manière. La forme la plus pernicieuse et la plus cynique de cette apartheid trouve son essence dans la formation universitaire, ou les étudiants Francophones jouissaient d’un avantage arbitraire, par le simple fait que les cours importants se faisaient en Français. Cette situation a duré longtemps, et une génération d’étudiants Anglophones a ete ainsi spolié de sa chance de faire éclater son génie.




2- Le lancement de la CRTV etait une occasion historique pour notre pays d’exprimer a travers cette nouvelle tribune, sa richesse, et sa diversité. Les Anglophones, qui avaient compris cet enjeux, s’étaient investis à fond pour apporter leur savoir, leur génie, et contribuer ainsi à faire de cette chaine un medium de référence. De grands noms, tels que Eric Chindje, Akwanka Jo Difor, Boh Herbert etc, ont pu donner à la CRTV ses lettres de noblesse. Victimes d’aparteid et de mépris, ils sont partis les uns apres les autres, au profit d’une clique de journalistes francophones carrieristes, prêts à toutes les compromissions et de lacheté pour garder leurs postes. Depuis lors, cette chaine a perdu de sa superbe, car ceux qui, grace a leur independance et leur equité faisaient sa force et sa notoriété, ont foutu le camp.

3- Nous pouvons ne pas etre contents, mais nous devrions au moins avoir le courage de reconnaitre que les gisements qui produisent le petrole par millions de barils tous les jours se trouvent sur les terres occupées par les Anglophones. Ce peuple profite-t-il des retombées economiques de cette manne? Quel peuple au monde peut-il accepter, sans reagir, d’etre ainsi spolié de ses richesses, sans en profiter? J’ai sillonné, comme certains d’entre nous ici, les regions du Nord et du Sud Ouest. Il faut dire que le cynisme de Paul Biya est sans limite. Les deux provinces Anglophones sont les plus proches sur le plan geographique. Pourtant, pour aller de Buea à Bamenda, il faut traverser par deux autres provinces, le Littoral et l’Ouest, et rouler sur plusieurs centaines de kilometres. Pourquoi? Simplement parce qu’il n’y aucune route qui relie les deux provinces qui possedent le sous-sol le plus riche du pays. Pour une region qui produit l’integralite de notre petrole, qui, grace a la CDC est la premiere production agricole du Cameroun, et le deuxieme employeur apres l’Etat, j’ai l’humilité d’accepter que les Anglophones sont un Peuple pacifique, car au Nigeria voisin, une situation similaire a créé au moins une guerre civile par le passé, et aujourd’hui, une instabilité permanente dans le Delta du Niger




4- Dans la vie d’un Peuple, les symboles sont aussi forts que les institutions. Parmi ces symboles, il y a l’hymne national, et le drapeau. Chaque peuple, chacun citoyen se reconnait, se défini par rapport a ces deux symboles. Que s’est-il passé avec le drapeau du Cameroun? Nous avons eu un drapeau vert-rouge-jaune, avec deux étoiles frappées sur la bande verte. Ceci était le résultat d’un consensus national, et les deux étoiles étaient là pour rappeler que notre pays est un système fédéral a deux Etats. En 1972, faisant preuve d’un mépris légendaire, le régime d’Ahidjo décide de façon unilatérale, de tout changer. Le Cameroun devient “République Unie” et l’une des étoiles disparait, pour laisser la place a une seule étoile frappée sur la bande jaune. Lorsque le dictateur Paul Biya prend le pouvoir en 1982, il achève définitivement le processus d’assimilation du Peuple Anglophone, en faisant disparaitre le mot “Uni”. Il ne s’agit pas ici d’un cours sur les sciences politiques ou la géostratégie, mais d’une vérité simple, mais irréfutable. Quel peuple peut-il accepter un tel mépris, sans réagir. J’ai, une fois de plus, l’humilité de reconnaitre que les Anglophones du Cameroun sont un Peuple pacifique.

5- A la faveur du multipartisme en 1990, les Anglophones se sont jetés a corps perdu dans le processus, et dans la bataille pour le changement au Cameroun. Frustrés par la spoliation de la victoire de John Fru Ndi en 1992, qui a convaincu même les plus tolérants et les plus pacifistes des Anglophones qu’il y avait un plan diabolique pour détruire leur identité, les leaders Anglophones créé la All Anglophone Conference (AAC) et posent un certain nombre de revendications pertinentes. Paul Biya répond par un état d’urgence qui a paralysé le Nord Ouest pendant plusieurs mois, pendant lesquels les Anglophones ont été victimes de crimes odieux et d’humiliations de toutes sortes. Sur les antennes de la CRTV, des gens qui sont connus, et qui sont toujours en poste, les traitent de Biafrais, et leur demandent de rentrer au Nigeria s’ils ne sont pas contents. Dépités, les leaders Anglophones lancent la AACII, a laquelle Biya répond par son mépris habituel. La AACI et II prouvent le caractère honnête, responsable et pacifique de la démarche des Anglophones. Face à l’indifférence du pouvoir corrompu, certains leaders Anglophones franchissent le pas, a l’instar de feu Albert Mukong, qui décide de démissionner du SDF pour se consacrer a la cause Anglophone. Progressivement le SCNC se met en place, et prend corps. Paul Biya connait les causes, les raisons et les conséquences de l’existence du SCNC. En laissant un tel mouvement prendre corps par son mépris et son indifférence, il a prouvé une fois de plus qu’il n’est pas a sa place de la tète du Cameroun. Pourtant malgré toutes ces humiliations, la SCNC est restée dans une démarche pacifique, juridique, responsable. Au lieu de prendre les armes, (comme beaucoup auraient pu faire dans leur cas) ils ont porté l’affaire devant les institutions internationales, et depuis lors, poursuivent leur combat a ce niveau. Nous devrions leur être reconnaissants, et personnellement, je me sens solidaire de leur lutte. Pas pour que le Cameroun soit divisé, car je suis convaincu que dans un pays qui reconnait leur place, leur identité et leur force, un pays ou ils sentent chez eux, les Anglophones apporteraient beaucoup pour le développement du Cameroun.

6- J’entends souvent certains compatriotes justifier l’humiliation des Anglophones par le fait que toutes les tribus et communautés au Cameroun ont des problèmes. Ils ont parfaitement raison. Il faut maintenant ajouter que les Anglophones ont les mêmes problèmes que toutes les autres communautés, puis, ils ont encore d’autres problèmes, encore plus graves, simplement parce qu’ils sont Anglophones, et voilà toute la différence.

7- Maintenant, que faire donc? Allons-nous venir seulement sur les fora et nous balancer des invectives, prouver qu’on a raison et que les autres ont tort. Je ne crois pas. Nous avons tous tort, jusqu’a ce qu’ensemble, nous puissions trouver des solutions a ce problème. Si nous attendons que Paul Biya fasse amende honorable et reconnait ses crimes, nous perdons notre temps. La première démarche, a mon avis, serait que la diaspora Camerounais prenne cette affaire a bras le corps, pour tenter au moins de désamorcer ce qui pourrait un jour nous éclater sur la figure, car je suis convaincu qu’il s’agit d’une bombe a retardement. Pourquoi les Camerounais de la diaspora, toutes tendances confondues, ceux qui pensent au Cameroun de demain, ne pourraient-ils donc pas se rencontrer pour poser les bases d’une nouvelle République, et nous donner ainsi les moyens intellectuels et humains de nous battre pour cet objectif? Voila notre challenge!
PS: Toutes mes excuses pour les accents

Brice Nitcheu

Londres

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

You May Also Like

The Two Cameroons Maps Handed To Biya By UN-6 years after

On 20th May 2010, the United Nation’s 64th President of the general Assembly, Ali Triki was…

OPERATIONAL COMMAND ENVISAGED-MASS MURDER SCHEME IN AMBAZONIA

OPERATIONAL COMMAND ENVISAGED-MASS MURDER SCHEME IN AMBAZONIA Following the woeful failure to…

Decentralising the University of Bamenda: On-going debate.

Universities are ’bridges’ to global economy knowledge and could serve to sustain…

The Debate: What Happens to SCACUF after the Interim PM Election?

Southern Cameroonians are asking what will happen to SCACUF after the election…